Hades & Ellie - Meeting with the devil

Après un sourire à la serveuse qui venait de lui rendre sa carte, la jolie brune la rangea dans son portefeuille puis mit ce dernier dans son sac à main, avant de se munir de sa commande. Son sac de pc sur une épaule, une boite contenant une dizaine de mini muffins dans la main gauche, de l’autre, un café Macchiato Caramel qui sentait délicieusement bon et voilà que la business woman un peu chargée sortait du local, prête à affronter sa journée.  Et quelle journée qui l’attendait ! Pas moins de quatre rendez-vous clients l’attendaient ce matin dans son bureau en centre-ville puis elle avait ensuite une visite de l’Aria Resort & Casino à quatorze-heures pour peaufiner avec la responsable de la partie hôtel, un projet de décoration des chambres et suites, avant la grande présentation qui aurait lieu la semaine d’après avec pour unique juge le PDG  de cet établissement. Pas de doute, si elle voulait décrocher tous les contrats, un petit boost caféiné lui ferait le plus grand bien. D’ailleurs, ce soir, elle serait bien contente d’avoir un petit moment pour souffler en compagnie ou non de son « colocataire » après une telle journée.

Mais avant ça, elle allait devoir se dépêcher si elle ne voulait pas être en retard à son premier rendez-vous. D’un pas rapide, elle filait direction son office, quand soudain alors qu’elle tournait à l’angle de la rue, elle vint percuter de plein fouet la personne qui arrivait en face, sûrement tout autant dans ses pensées qu’elle. A cet instant, le temps sembla se figer. Spectatrice, Ellie vit le couvercle de sa cup s’envoler dans les airs et le gobelet taper un mur de muscles qui bientôt était arrosé du liquide brun brûlant. Impossible d’éviter l’incident. L’inconnu allait avoir un coup de chaud et la demoiselle s’en voulait déjà. Eloignant au plus vite son bras, se fichant bien de sa commande, elle s’exclama sans même voir de qui il s’agissait : « Oh mon dieu, je suis désolée …. Je ne vous avais pas vu. » Son premier réflexe fut de jeter sa boisson dans la poubelle la plus proche pour se libérer une main, qui lui servit pour éponger le polo noir avant que ce ne soit la catastrophe, à l’aide de l’une des serviettes qu’on lui avait donné avec sa commande matinale. « J’espère que je ne vous ai pas brulé… je paierai votre pressing… je suis tellement… » Ce n’est qu’en relevant son minois et apercevant le beau brun que ses pensées s’arrêtèrent net pour la laisser sans mot. Qu’il était séduisant. Son regard dur et froid lui donnait un côté mystérieux qui elle en était certaine en faisait fondre plus d’une. Un petit sourire désolé vint élargir ses lèvres tandis que se billes brunes étincelantes se plongeait encore d’avantage dans le regard de son interlocuteur, comme si elle était aimantée à cet individu qui faisait son apparition dans son existence. « Désolée… »

Prononçant une langue qu’elle reconnut mais sur laquelle elle fut incapable de mettre de nom tant son esprit et son corps s’affairaient déjà à essayer de réparer la bêtise commise, la belle demoiselle s’activait ignorant totalement qui elle à qui elle avait affaire. Une erreur, qu’elle regretterait sûrement un jour, quand elle se rendrait compte que cet instant avait fondamentalement donné un tout nouveau tournant à son existence. Cet homme qui l’impressionnerait bien trop rapidement par sa prestance, son charisme et son sex appeal n’était autre que celui qu’elle fuyait depuis des années et qu’elle détestait profondément pour lui avoir volé à tout jamais ses parents. Pourtant, en ce même instant, dans cette rue passante, tout autour d’eux semblait s’être arrêté, n’être devenu que brouhaha sourd pour laisser naitre l’ambiguïté entre deux êtres qui n’auraient jamais dû se rencontrer. C’était comme s’ils étaient seuls et que rien de cette folie matinale ne pouvait les atteindre. Seule sa main venant retirer celle en action de l’ancienne avocate, ne lui fit lever les yeux de sa cible pour trouver les billes sombres de son interlocuteur. Et là, une fois de plus, il n’y eut plus qu’eux. L’un perdu dans le regard de l’autre, s’observant avec minutie.

Quelques paroles et voilà que son accent fut ce qui la réveilla. A entendre cette consonance, le coeur de la brunette dont il tenait toujours la main, s’emballa. C’était comme si immédiatement tout son corps se mettait en hypervigilance. Un russe. Devait-elle se sentir en danger ? Comme une gazelle devant un lion, tout son corps était prêt à fuir s’il le fallait, seulement elle restait figée là, presque envoûtée, aimantée…Ce ne fut que lorsqu’il tenta de la rassurer, apaiser sa culpabilité qu’elle sentit tous ses muscles se décontracter. S’il lui avait voulu du mal, elle ne serait déjà plus de ce monde, non ? Son sourire ne quitte plus ses lèvres quand son tour l’inconnu lui en offrit un. Une dernière excuse soufflée et elle comprit vite qu’elle devait arrêter sous peine de l’agacer. A sa proposition, elle regarda sa montre et une petite moue se dessina sur son minois. Si elle acceptait nul doute qu’elle serait en retard à son rendez-vous et professionnelle jusqu’au bout des ongles, elle ne pouvait l’être. «  Malheureusement, cela ne va pas être possible pour moi … j’ai … » Bing. Bing. «  Un instant s’il vous plait… »

De sa main libre, la brunette prit son téléphone et n’en crut pas ses yeux quand elle lut les quelques mots de ses premiers clients du matin. Victoria était la maternité pour un examen d’urgence, sûrement un accouchement prématuré et ils ne pourraient se rendre au rendez-vous. Etait-ce un signe ? Son planning venait de se libérer pour deux heures et plus rien ne lui servait d’excuses à refuser. Comment le faire quand les planètes semblaient tant alignées pour que ce « rendez-vous d’excuses » ait lieu. « Il semblerait que ce soit votre jour de chance. Mon agenda vient de se libérer comme par magie, et puis je vous dois bien ça…alors … disons que j’accepte… » Elle marqua une pause avant de reprendre sur le ton de l’humour: «  Si je vous accompagne pour café et gourmandise, vous me promettez de pas me balancer dans le premier fourgon noir qui passe pour me kidnapper et me séquestrer avec bien d’autres jolies femmes qui vous auraient dit oui? » C’était un boutade mais au fond, elle tapait dans le mile. Venant attraper sa main, elle la serra avec fermeté et reprit « Ellie. Enchantée de faire votre connaissance Hadès. » Ce n’est que quelques secondes plus tard qu’elle la lâcha pour l’inviter à le suivre.


Arrivant au café d’où elle sortait, ils allèrent s’asseoir à une table où quelqu’un vint prendre la commande. Reconnaissant Ellie, il n’eut pas à demander et s’enquit donc uniquement sur ce dont désirait son accompagnant. Quand ils furent enfin seuls, Ellie se lança : « Je vous invite et je tiens à payer le pressing pour la veste. »

Bon sang. Que diable se passait-il tout à coup ? Voilà que le destin semblait d’avis de s'amuser avec les deux jeunes gens qui après s’être rentrés dedans, ne cessaient de s’observer. Ils avaient beau ne rien connaître du second, il y avait entre eux quelque chose de presque magnétique. Plongés dans le regard du beau brun, n’ayant plus pleinement conscience de ce qui l’entourait, tant il était envoûtant, la belle avocate en était presque déstabilisée. Oui, il la troublait et comme si ça ne suffisait pas, elle se débattait avec une tâche qui ne voulait pas partir, agaçant ainsi le pauvre jeune homme qui avait reçu le café bouillant. Un vrai début de matinée pourri. Si bien qu’elle se demanda un instant si elle n’aurait pas mieux fait de rester couchée. Pensait-il à la même chose ? A en croire sa proposition, il serait plus du style à profiter de cette opportunité qui venait de s’offrir à lui. Le seul hic, peut-être son accent qui fit frissonner la belle et un emploi du temps bien trop chargé pour qu’elle n’accepte…

Mais là encore, le destin n’avait pas dit son dernier mot et comptait bien se moquer d’eux, leur offrant l’occasion de faire plus ample connaissance, malgré tout ce qui les opposait. Un coup de fil. Une annulation et voilà que désormais l’agenda libéré, Ellie ne pouvait plus lui refuser cette réparation pour le café renversé. Avenante, elle sourit alors et lui confirma qu’elle acceptait à condition , comme il était encore un étranger pour elle, qu’il ne la kidnappe. Cette touche d’humour le fit rire et elle nierait si elle disait qu’il n ’était pas encore plus séduisant dans cette situation. A sa remarque, une part d’elle, minime et encore marquée par son accent, n’était pas rassurée pour autant, cependant la brunette la fit taire pour se concentrer pleinement sur son bel interlocuteur. Elle répondit donc le rouge lui montant aux joues un petit : « Merci pour le compliment » sans même se rendre compte qu’elle appréciait son regard et son attitude alors qu’elle aurait du vouloir le mettre derrière les barreaux pour lui avoir volé sa vie. Mais non, comme si de rien était, comme si leurs vies n’étaient pas déjà liées, elle se présentait avant de prendre avec lui la direction du café le plus proche. Comment pouvait-on être aussi aveugle et tellement attirée par l’inconnu qui avait gâché à tout jamais votre vie ? Si elle avait su la vérité, nul doute qu’elle se serait détestée immédiatement d’être aussi faible face à une telle alchimie.

Assis à table, les commandes passées, leurs billes brunes se retrouvèrent à nouveau et ils discutèrent des conditions, que le jeune homme n’accepta qu’à moitié. Un négociateur ? Allait-elle le laisser gagner? Après un sourire, elle dit tout bas « Peut-être mais ça me fait plaisir…. Vous n’oseriez quand même pas me peiner ? Et puis, s’il y a que ça, ça vous permettra même de me revoir … A moins que vous préfériez éviter ? » Elle jouait avec le feu, ne sachant pas qu’un jour elle finirait par tomber de haut et de se brûler… la pauvre ! Attendant qu’on leur serve leur commande, Hadès s’enquit sur sa profession, et elle répondit avec franchise. « Je suis décoratrice d’intérieur. J’ai un petit cabinet en plein centre et je comptais m’y rendre avant que je ne vous rentre dedans et que le client annule le rendez-vous. Et vous ? » demandait elle avec intérêt, tandis que s’approchait la serveuse qui déposait devant eux les commandes. Brièvement interrompus, elle en profita pour observer le Russe face à elle et ne put s’empêcher de sourire. Cet homme devait faire des ravages. Ce qu’il dégageait de mystère avait le don de la titiller. Et il fallait croire que c’était un sentiment réciproque vu ce que venait d’avouer le charmant jeune homme. Elle ne savait pas s’il sortait ce genre de phrase à tout va avec les femmes où si elle devait se sentir touchée alors elle tenta de rester le plus calme et détachée possible. Innocemment -ou pas- Ellie vint mettre des mots sur sa pensée : « Est-ce votre moyen d’aborder les femmes pour les séduire ? Les complimenter vous ouvre t’il toutes les portes ? » elle ne savait pas pourquoi mais elle n’avait pas envie de se laisser si facilement amadouer. Cherchant toujours à se protéger, dans la méfiance en l’égard de la gente masculine, elle avait besoin de plus que des mots … des actes. Cependant, une part d’elle était décontenancée face à un tel spécimen. « J’espère que c’est une bonne chose. Et puis ce n’est que le début vous n’avez encore rien vu. » rétorquait-elle taquine, installant ainsi entre eux un jeu du chat et de la souris. Entraient-ils vraiment dans un dangereux jeu de séduction ? Aie aie aie .

Se délectant de quelques douces et chaudes gorgées de son breuvage, elle le questionna à son tour : « Vous êtes en ville depuis longtemps ? C’est la première fois que je vous croise et votre tête ne me dis rien… je m’en serai souvenue » elle lui proposa un des muffins achetés précédemment pour accompagner son café , prête à en apprendre plus à son sujet. Si elle adorait le mystère qui l’entourait elle ressentait comme cette nécessité de faire plus ample connaissance

Si on lui avait dit qu’en un regard à un inconnu elle pourrait être charmée, vu son passé et l’avenir toujours incertain qu’elle avait, jamais l’ancienne avocate n’y aurait cru. Elle, pourtant si méfiante avec les étrangers, surtout quand elle entendait dans leur voix l’accent russe, semblait faire une exception avec Hadès. Pas de doute, son sourire l’envoûtait et voilà qu’elle taisait ses craintes pour lui ouvrir des portes. Mais que diable lui arrivait-il ? Quel était donc ce pouvoir/cette emprise qu’il avait sur son être en un battement de cils ? Etait-ce une farce du destin que de la pousser dans les bras de l’homme qu’elle détestait le plus au monde et qui ne désirait qu’une seule et unique chose : sa perte ? Quand elle apprendrait sa véritable identité, si un jour cela devait arriver, nul doute qu’elle serait à nouveau bouleversée d’avoir été autant chamboulée par sa présence. N’était-ce pas là un comble que d’être indéniablement attirée par un ennemi ? Ses yeux ancrés dans les siens, ayant pris place à une table du café, les commandes passées, elle négociait sans répit pour réussir à lui payer le pressing. Elle joua ses meilleures cartes lui rappelant qu’ainsi il pourrait la revoir. Quelle tentatrice ! Elle était presque persuadée qu’ainsi il ne pourrait pas le lui refuser. Maligne, non ? Sa réponse confirma sa pensée et un doux sourire vin élargir ses lèvres. Fière d’elle, elle posa le pour et le contre à sa proposition et accepta. Quelle erreur ! « C’est d’accord. Par contre, j’ai une petite condition. Nous resterons sur une gamme de restaurant au tarif abordable, car sinon ça vous reviendra plus cher que ce que j’ai payé au pressing. » Ne laissant pas de place à la discussion, elle lui tendit la main pour clôturer le deal.

La conversation changea et la belle compris qu’elle attisait l’intérêt de son interlocuteur curieux et avide d’information à son sujet. Cela aurait-il dû l’inquiéter ? la faire douter ? Certainement, mais elle n’y voyait avec lui que du feu. Sans tout lui dire, elle évoqua son second métier avant de le questionner à son tour, tout autant intéressée. « Je suis sûre que vous avez de la clientèle. Ce genre de loisir peu insuffler un peu de vie dans une petite ville comme St Hope. Vous avez bien fait. » Ne faisant pas le rapprochement avec son rendez-vous l’après-midi même avec la responsable de la partie hôtel, elle ne s’imaginait que si le projet se faisait avec le Resort, elle aurait plein d’occasion de recroiser ce très bel étalon.

Les boissons déposées devant eux, et quelques compliments plus tard, Ellie le suivit sur un chemin sinueux : doux jeu de séduction pourtant si dangereux…. Les yeux brillants, sourire qui ne quittait plus son minois, elle devait avouer qu’elle appréciait l’attention toute particulière qu’il lui offrait. C’était agréable de plaire et d’intriguer un aussi bel homme. « Vous avez bien raison et qui plus est un art qui a tendance à se perdre. Dois-je craindre de succomber ? » Elle n’était pas aveugle, elle était à son goût et il cherchait à marquer des points. La jolie brune, sans le quitter de ses prunelles noisettes vint replacer une mèche derrière son oreille et avant de baisser ces dernières à hauteur de ses lèvres qui testaient son breuvage. « Pas déçu, vous le trouvez bon ? » Tout ce qui sortait de derrière ce comptoir était validé pour la belle, mais comme les goûts et les couleurs ça ne se discute pas, elle espérait que cela lui conviendrait aussi.

Quelques gorgées de sa boisson chaude et elle éveillait en lui une envie de la revoir. Désir partagé, mais elle ne mit pas de mot sur cela, préférant lui répondre : « Il n’y a rien de mieux qu’une femme mystérieuse et inatteignable comme challenge ….n’est-ce pas ? » Elle marqua une pause pour croquer un muffin et ajouta : « Plus c’est dur plus la victoire est belle et intense » Oh la la la la …. Elle jouait et plus rien ne semblait l’arrêter. Ellie humecta ses lèvres, avant de le questionner à nouveau et elle adora sa répartie. Avait-elle trouvé un adversaire de taille ? « Vous croyez…hummm … pas sûr. Il en faut plus que cela pour me marquer, à vous de bien jouer vos cartes. » Bluffait-elle ? Il allait devoir parier et voir ce qu’il arrivait. N’en croyant pas son interrogation, elle mit quelques secondes avant de réagir, bien que la réponse était claire. Non, pas de petit ami à l’horizon elle était libre comme l’air et pouvait donc batifoler si le cœur lui en dit. Et puis ne serait-ce pas un bon moyen pour éloigner le beau petit Rick de son esprit. Sans mesurer sa réponse, elle lâcha : « Ma famille n’est pas sur St Hope et je suis célibataire, plus accrochée à mes amis et mon travail qu’à une relation. » Ne pas s’enticher, s’amouracher lui évitait ainsi d’être abandonnée ou de perdre à nouveau quelqu’un et c’était notamment l’une des raisons qui la poussait à se refuser de s’attacher encore plus à son colocataire. « Ne me dites pas que vous êtes déjà sous le charme …. Je vous pensais plus résistant voyons. » Elle rit aux éclats avant de reprendre une énième gorgée de son breuvage. C’était impressionnant de voir comme elle était à l’aise et que la discussion était fluide avec lui. Le feeling passait et près de lui, à cette vitesse elle risquait de perdre la notion du temps, tant c’était facile. « Si nous continuons ce petit jeu de question/réponse, j’en ai une pour vous : Qu’est-ce qui vous fait le plus vibrer dans la vie ? votre métier ? une passion ? les femmes ? les hommes ? »

Le temps, dont les secondes s’égrainaient à chaque souffle, semblait s’être arrêté tandis que les deux jeunes gens discutaient à une table du café, leurs boissons bientôt déposées devant eux. C’était incroyable de voir à quel point ils s’intriguaient l’un l’autre. Incapable de détacher le regard du second, comme envoûtés, ils négociaient chacun leur tour pour gagner quelque chose de cette rencontre impromptue, et si cela n’était qu’un pressing rembourré pour la belle décoratrice d’intérieur, le russe lui avait le droit à bien plus : une occasion de la revoir. Porte ouverte à un date dans un restaurant de son choix, Ellie lui laissait là une opportunité que peu avaient eu depuis longtemps. De la pure folie ! Mais comment pouvait-elle savoir un seul instant qu’elle risquait de peut-être le regretter. Tout sourire, ses billes noisettes plantées dans les siennes, elle acquiesça: «  Plus c’est simple, mieux ce sera…sinon les commères de la ville risquent de croire à un date et un coup de foudre. Il vaudrait mieux éviter non ? » Ou peut-être était-ce un date ? Non, impossible …quoi que… à cette pensée son palpitant s’emballa. Comment un inconnu pouvait-il lui faire ce genre d’effet. L’alarme en elle s’activa. Etait-ce une bonne idée ? Peut-être était-ce un piège ? Et s’il n’était pas l’homme qui la recherche mais qu’il parlait d’elle à un compatriote qui parlait à son tour d’elle et que ça remontait aux oreilles de la Bratva ? Nul doute qu’elle allait devoir se montrer prudente sur ce qu’elle allait lui dévoiler.

Et cela commençait dès le départ de cet interrogatoire plus que banal, sûrement simplement mis en place pour faire connaissance. Se concentrant sur sa couverture, elle délivra des informations de sa nouvelle vie sans trop entrer dans les détails pour autant et toute aussi curieuse qu’elle, elle le questionna à son tour, sur sa présence ici et son métier. Se délectant d’une gorgée, elle l’écouta lui répondre quant au casino et fut troublée par la fin de sa réponse. Le pensait-il ? Ou n’était-ce là qu’un moyen de la séduire, une phrase bateau qu’il ressortirait à tour de bras pour convaincre les jeunes demoiselles de se laisser aller dans ses bras. Ses iris ne se détachant pas des siennes, elle le scruta comme pour s’assurer du sens de ses propos. D’une voix posée, elle lança: «  C’est vrai. Dois-je comprendre que vous êtes heureux d’avoir fait ma rencontre ? Pensez-vous que c’est le destin ? Je ne vous imagine pas du tout comme un romantique dans l’âme qui pourrait y croire, mais je me trompe peut-être… » Elle le testait, voulant creuser pour savoir si ce n’était que des belles paroles. Pourquoi donc cela l’intéressait autant ?

Il se dit alors franc et loin de cacher ce qu’il pense et voilà que cette information la fit frissonner. Ça avait quelque chose de grisant que de savoir qu’elle l’intriguait, que ce qu’elle ressentait était réciproque. Un brin décontenancée, elle n’en laissa rien paraitre, son minois allant de haut en bas pour confirmer ses dires. Ellie n’était pas une femme imbue d’elle-même mais elle avait souvent remarqué qu’elle était capable de faire chavirer le coeur de certains beaux mâles et quand il lui parlait ainsi, la regardait avec autant d’intensité, elle se disait que peut-être ça risquerait d’arriver. Bon d’accord, elle l’avait dit avec humour, mais soyons réalistes, il se passait entre eux un feeling, qui pouvait les conduire plus loin qu’une simple rencontre platonique. « C’est bien vrai…autant se laisser porter alors et voir ce que la vie nous réserve. » Marquant une courte pause, lors de laquelle elle prit une nouvelle bouchée de son muffin, elle haussa les épaules. « Qu’est-ce qu’une vie sans risque ? Jouer, se brûler, ça peut-être grisant et les échecs ? Ils font grandir, se relever, se battre et essayer de devenir qu’une meilleure version de soi-même. » Une peine de coeur ? Un risque? Ce ne serait pas une première et elle était mince quand on la comparait à l’opportunité de trouver la personne qui nous convient, nous complète.Pour l’amour, Ellie était du genre à tenter sa chance. Oui, elle l’assumait elle était une romantique quoi qu’il lui en coûte. Si bien , qu’inconsciemment peut-être, elle joua sur les mots, prête à affronter tout ce qui pourrait advenir. A voir, s’il aurait une bonne main et mordrait à l’hameçon . Avec lui, elle se surprenait. Lui livrant qu’elle était célibataire et libre comme l’air, elle se demanda un instant pourquoi cela l’intéressait ? Avait-il des vues sur elle ? Taquine, elle lui demanda s’il était sous son charme et sa répartie ne l’étonna pas.  « Vous risquez d’être déçu! » Tenta sa raison qui essayait de les mettre sur leur garde. Ses instincts lui criaient de mettre fin à cette rencontre, et pour la première fois depuis leur rencontre, elle prit du recul pour examiner la situation. Elle devait se protéger, elle et son entourage et pour cela il fallait qu’elle n’en dévoile pas trop… elle ne pouvait pas le laisser creuser de trop près «  Y a pas grand chose d’intéressant, je suis une banale décoratrice d’intérieur. Il y a bien à vous mettre sous la dent dans une ville comme St Hope je suis sûre. » Accompagnant ses mots d’un sourire qui se voulait sincère, elle prit une énième gorgée de sa boisson finissant de le questionner sur ce qui pouvait bien le faire vibrer. Chassez le naturel et il revient au galop. En un instant, elle passait de craintive à intéressée et touchée par ce nouveau compliment. Dans un doux murmure, le coeur pincé, elle dit : « La famille, il n’y a que ça de vrai. Quand on peut, il faut en prendre soin. » elle regrettait de ne pas avoir pu protéger les siens, elle …. Son masque cachant la peine qui venait de croitre en elle, elle but d’une traite son breuvage pour ne pas qu’il voit à quel point en parler avait pu la déstabiliser. «  Ce qui me fait vibrer ….mmmh … aider mon prochain, me perdre en nature et sûrement les hommes…quand j’arrive à leur laisser une chance. » Serait-il quelqu’un à qui elle laisserait une chance ? Elle n’en savait rien et ne voulait pas se poser cette question aujourd’hui de peur que sa raison reprenne le dessus. Un coup d’oeil à sa montre et elle constata qu’elle avait encore un peu de temps pour lui. « Rassurez-moi, vous n’avez à part votre soeur aucune femme dans votre vie ?  Je ne voudrais pas causer d’histoire si c’était le cas.» Elle remit une mèche de cheveux derrière son oreille et finit par dire : «  Aussi agréable que soit cet entretien, je ne devrais pas tarder à vous quitter car mon programme est chargé. Puis-je avoir votre veste et votre numéro pour que je puisse vous l’apporter une fois nettoyée et vous prévenir pour que le moment vous convienne?  Ce serait dommage de partir trop vite et de l’oublier après l’avoir tâché…»

Un sourire sur les lèvres l’ancienne avocate hocha négativement du minois en guise de réponse. « Malheureusement vous n’avez pas tort. Pour ma part, je préfère éviter les ragots et je sais d’habitude rester bien en dehors de cela. S’ils parlent sur moi je n’en ai cure, je sais qui je suis et ce que je vaux. » Il avait raison. L’image. Un tourment pour beaucoup et une force pour quelques chanceux. De nos jours, plus cela allait et plus on se souciait de l’image qu’on reflétait aux yeux des autres. Les réseaux sociaux, les émissions de téléréalité, les magazines n’aidaient pas à améliorer la situation. Et si Ellie se fichait bien des « on-dit », elle aimait pourtant rester discrète, pas pour une question d’image, mais plus à cause de son passé compliqué. N’était-ce pas le mot d’ordre depuis quelques années que ne cessaient de lui répéter les agents en charge de sa sécurité. * Ne fais pas de vague. Garde la tête basse. N’attire pas les regards qu’on pourrait te reconnaitre et donc te retrouver * A chaque fois, la jolie brune avait tenté de le faire, et le naturel revenait au galop dès lors qu’elle voyait des injustices ou qu’un « proche » était atteint. Quand cela arrivait, pas le temps de penser qu’elle agissait et cela lui avait coûté bien des changements de vie. Pour l’instant, jusqu’ici, elle avait réussi à faire profil bas, mais personne n’était capable de savoir combien de temps cela allait durer. Prendre soin des autres, les défendre coûte que coûte, c’était plus fort qu’elle.

A St Hope, sous ses airs de femme mystérieuse et inatteignable, Ellie avait réussi à mettre des distances et élever des barrières pour se protéger, n’inspirant jamais le doute chez ses interlocuteurs quant à qui elle était. Une chance qu’elle comptât bien faire perdurer. Pour cela, elle avait notamment essayé de ne pas s’engager dans le flirt ou quelconque relation amoureuse avec les habitants de la ville, sauf peut-être Blake, et elle devait avouer qu’en cet instant précis, troublée par cet homme face à elle, qu’elle ne connaissait pas vraiment, elle n’avait pu y échapper. C’était comme si le destin l’avait poussé dans ses bras pour qu’elle devienne sa nouvelle proie et lui la sienne. Jeu dangereux auquel ils s’adonnaient et pour lequel ils risquaient de se brûler les ailes. Le pire dans tout cela ? C’était qu’elle adorait le regard qu’il avait sur elle. C’était grisant de savoir qu’elle lui plaisait, l’intriguait, et de chercher à savoir qui gagnerait ou craquerait le premier. Le courant qui passait entre eux était magnétique et un rapprochement semblait inévitable. Si elle lui accorda un simple sourire en guise de réponse elle, malgré tout ce qui lui était arrivé, croyait à la destinée. Parfois, on n’était pas maître de son destin. On avait beau jouer, parier, prendre des risques ou non, la vie nous réservait toujours des surprises et la destinée prenait le dessus, dans des rencontres, des pertes, ou même lorsqu’elle nous offrait des opportunités.

Apprenant à faire connaissance autour de leurs cafés, les minutes filaient à toute vitesse, tandis qu’ils sympathisaient plus qu’ils ne l’auraient dû. Abordant leurs vies respectives, leurs métiers, la décoratrice d’intérieur fut heureuse de voir qu’il s’intéressait à ce qu’elle disait. « Si c’est le cas, vous pourrez compter sur moi. D’ailleurs, si je ne me trompe pas j’ai un rendez-vous téléphonique avec une responsable d’hôtellerie cet après-midi pour fixer un rendez-vous physique et faire un premier point sur la situation, mais elle ne m’a pas donné le nom de ce dernier juste une adresse. Vous avez beaucoup de concurrents dans le coin ? » Si ce n’était pas le cas, était-ce possible qu’elle rencontre une de ses employées ? Fortement et là dur serait de croire qu’il ne s’agisse que d’une simple coïncidence …Oui, ce serait bien un coup du destin. Les questions réponses filant à toute allure, elle en serait bien vite sur lui qu’elle en avait appris sur certains habitants qu’elle côtoyait depuis des mois. Heureuse de partager avec lui le sens de la famille et d’avoir certaines valeurs communes, elle comprit bien vite qu’elle ne pourrait chasser cette envie d’en apprendre encore d’avantage et de passer du temps en la compagnie de ce beau mâle qui ne la laissait guère indifférente. Peut-être serait-il l’un des chanceux qu’elle laisserait entrer dans sa vie ? Afin de s’assurer que c’était une possibilité, elle le questionna sur les femmes de sa vie. Hors de question que de ne se rapprocher trop dangereusement d’un homme déjà pris. « Je suis désolée. » sa main avait franchi inconsciemment la distance qu’il y avait jusqu’à la sienne pour venir l’enserrer comme pour lui donner du courage et son soutien. Les peines de cœur, ce n’était jamais évident. Un frisson la parcourut et elle s’aperçut de son geste. Gênée, elle retira immédiatement sa main et vint de son autre main remettre une mèche qui la gênait. Lui demandant sa veste, prête à décoller sous peu avant de faire d’autres pas risqués vers lui, elle prit cette dernière qui lui tendit et ne put s’empêcher de lui décocher un beau sourire à ses paroles. « Promis je veillerai à ce que le travail ne vienne pas empiéter sur notre diner et je serai toute à vous. » A peine ses mots franchirent la barrière de ses lèvres qu’elle y vit une connotation peut-être un peu coquine et elle du se retenir pour ne pas avoir le rouge aux joues. Elle chercha dans son sac une de ses cartes qu’elle lui tendit. « Envoyez-moi un petit message quand vous avez le temps pour que je récupère votre numéro et je vous tiendrais au courant pour votre veste. » Elle sortit ensuite quelques billets pour payer la note et se leva sans le quitter des yeux, sachant pertinemment qu’elle le reverrait bientôt. « A très vite Hadès et passez une bonne journée.» Les bras chargés de son sac à main et de sa veste, elle s’éloigna de son interlocuteur et lui accorda un dernier regard et un sourire une fois arrivée à l’entrée du café, avant de disparaitre et de filer à sa journée bien prise.